Artiste
Badi
Brief info
Bio 2020 // Album ‘Trouble-Fête’
Parfois, le mauvais avion permet d’atteindre la bonne destination. Ainsi, en 1977, la famille de Badi s’apprête à quitter le Congo pour rejoindre la Russie. Mais un changement de vol va en décider autrement, modifiant à jamais l’itinéraire d’une vie. Né à Bruxelles – et non à Moscou –, Badibanga Ndeka fait ses classes au sein du collectif Chant D. Loups. Après des collaborations avec Sefyu ou Youssoupha, le petit rappeur abandonne la meute. En solo, il façonne son univers et pose les jalons d’une véritable révolution. C’est que Badi est là depuis le début. Bien avant la hype et le triomphe du rap bruxellois, il posait déjà le flow aux côtés de l’ami Stromae. Biberonné aux clips MTV et à la rumba congolaise, l’artiste s’est construit un son et une solide réputation.
À l’heure de concevoir ‘Trouble-Fête’, son nouvel album, Badi s’est associé aux idées avant-gardistes du producteur Boddhi Satva. Pionnier de l’afro-house, inventeur de l’ancestral soul, ce dernier s’est déjà distingué en compagnie de Bilal ou d’Oumou Sangaré. Là où les sonorités de Boddhi Satva invitent l’auditeur à danser jusqu’au petit matin, les mots de Badi agitent les consciences et bouleversent les certitudes. Dandy facétieux, il interroge le monde et bouscule les modes. C’est que le Belge n’a pas sa langue en poche. Du genre à chanter ce qui se chuchote, à dire tout haut les réalités du prolétariat, Badi sourit, mais ne se trompe pas. Sous des mélodies luxuriantes, ses textes soulignent les carences d’une société défaillante. Comme en témoigne ‘Mauvaise Ambiance’, premier morceau d’un disque animé par des convictions XXL. Entre désenchantement ultime et hédonisme absolu, cri de résistance et chant du cœur, Badi capte l’air du temps. En phase avec les revendications du mouvement Black Lives Matter, l’artiste élève la voix sans excès de violence. Bbf des polémiques, à l’écart des statues, il déboulonne les préjugés et combat l’ignorance via cette grande chanson d’anticipation.
À une époque où les débats identitaires opposent fermement les extrêmes, le chanteur apaise les esprits en questionnant ses origines. Réceptacle de ses racines congolaises et de son quotidien au pays de Tintin, le morceau ‘Qui es-tu ?’ encourage ainsi la diversité – culturelle, sexuelle, sociale – et les libertés d’expression. Au passage, Badi met la question de l’identité au cœur de l’album.
Des nuits d’Abidjan aux avenues de Kinshasa, des pavés bruxellois aux défilés de mode parisiens, l’histoire du rappeur s’écrit au croisement des continents. Entre l’Afrique et l’Occident, il évoque d’ailleurs la figure de ‘Virgil Abloh’ dans un morceau plébiscité par le styliste en personne. Directeur artistique chez Louis Vuitton, l’homme est un symbole de la haute couture. Un domaine dans lequel Badi tire, lui aussi, son épingle du jeu. Depuis 2019, il gère en effet les créations de la marque BANXV, un nom inspiré par le mythique Article XV, législation imaginaire qui voudrait que chaque Congolais fasse preuve de débrouillardise pour surmonter les manquements de l’État. Cette passion pour les fringues se matérialise également sous le refrain de ‘Kitendi’, ode à la SAPE (Société des Ambianceurs et des Personnes Élégantes) et à sa dimension contestataire.
Signé sur les rangs du label BBE (Roy Ayers, Madlib, WILL.I.AM, Laurent Garnier & Carl Craig), le nouvel album de Badi traverse les frontières et se danse sans dictionnaire. Si le français est la langue maternelle des morceaux, les rythmes posés sur ‘Trouble-Fête’ embrassent bel et bien une dimension universelle. Rappeur, entrepreneur et voix de son temps, Badi donne ici le meilleur de lui-même. En flux continu et sans confinement.